Michel LAGARDE dispose depuis 2010 de son site Internet dédié au droit forestier: http://www.droitforestier.com
Aussi, Forestiers du Monde® a t-elle naturellement proposé la publication d’une interview avec son auteur, Michel LAGARDE, juriste forestier, Docteur d’Etat en droit dont la thèse porte sur le régime forestier, également membre de Forestiers du Monde®.
Michel LAGARDE, depuis quand la forêt vous passionne-t-elle ?
Je travaille sur le droit forestier depuis 1980 ; j’ai soutenu en 1984 une thèse de doctorat d’État sur le régime forestier, c’est-à-dire le droit des forêts publiques essentiellement. J’ai pu mener ce travail grâce à l’Ecole forestière de Nancy. Je rends hommage ici à cette école, son personnel à tous les niveaux, et aussi à celui de la direction à travers M. Joanny GUILLARD, et Jacques MILITON, et à la précieuse Madame LIONNET. Je me suis donc très tôt familiarisé avec les savants traités de droit forestier d’Édouard MEAUME, et de Charles GUYOT, pour ne parler que de ces monuments. J’ai pris leur lointaine succession dans l’enseignement de cette école, d’abord pour la formation des IGREF, puis de la FIF. Je ne l’ai quittée pour cause privée qu’avec regret.
Je sais que vous êtes également avocat. Qu’avez vous appris de plus ?
Dans la presque trentaine d’années qui ont suivi j’ai continué à écrire sur le droit forestier, soit par mes propres éditions, soit par le grand éditeur juridique Dalloz. Dans la lignée des encyclopédistes, j’ai souhaité approfondir ce droit, et si possible en faire la synthèse ; mon premier métier d’universitaire me l’a permis en partie. Soucieux d’autre part de « realpolitik », la fréquentation du contentieux et mon second métier d’avocat m’ont permet de mieux approcher l’application des textes.
Vous avez formé des forestiers, défendus des justiciables et aujourd’hui vous vous adressez aux citoyens internautes ? Quelles sont vos motivations ?
Pendant ces trois décennies, je suis donc allé des notions les plus détaillées, comme des contentieux sur des ventes de bois, jusqu’à une vision de législateur lorsque j’ai fait le code agro-forestier de Mayotte.
À notre époque de bouleversements permanents, il n’est pas aisé de réaliser une synthèse. En 1994, j’avais réussi à réaliser un code forestier commenté, unique en France. En 2001, la grande loi forestière est venue bouleverser le droit forestier. Emporté par d’autres tâches, et pas des plus petites, je n’ai pu continuer à œuvrer. J’ai poursuivi par contre la rédaction constante d’articles de droit forestier dans la revue la forêt privée de Charles CHAVET. Sans ces colonnes, depuis 1986, la centaine d’articles de droit forestier que j’y ai écrite ne serait jamais parue.
Parvenu à l’âge d’un demi-siècle, j’ai poursuivi mon idée d’une synthèse. La technique ayant changé, Internet s’imposait. J’ai donc en 2008, commencé à travailler sur ce site, et au bout de deux ans de travaux, en mai 2010, j’ai peux l’ouvrir.
Mon ambition est de mettre à la disposition de tous les forestiers la synthèse de l’œuvre que j’ai écrite en 30 ans. Pour la première fois depuis 1984, on y retrouvera ma thèse que j’ai entièrement recomposée sous forme numérique avec vérification des centaines de notes ; un travail important. On y retrouvera aussi tous mes articles, et tous mes livres, ou presque, et les plus récents comme celui sur le droit du champignon forestier.
Bien sûr, le droit est une discipline utilitaire. Mais c’est aussi une discipline de l’esprit pour qui peut s’élever au-dessus de la forêt, pour en mesurer la grandeur et la beauté.
Nous avons en France un héritage considérable. Mon souhait est alors double. J’espère un jour pouvoir transmettre à d’autres un édifice aussi bien ordonné et précis que le traité de Meaume. Les monographies que j’ai écrites sur des thèmes très précis (exemple le peuplier) constituent des éléments de la future synthèse.
Ensuite, dans le contexte de la mondialisation, et en législation forestière la France doit mettre en valeur cet héritage. J’ai jadis œuvré pour le Japon en ce sens. Aujourd’hui, le site offre une vitrine importante sur cette discipline insuffisamment connue. Ceci pour la grandeur de la France et le bonheur du monde, car plus on connaît, plus on aime.
Récemment.
Depuis 2010, J’ai travaillè au lancement sur Internet d’un petit périodique de droit forestier qui tous les quatre mois rendra compte des nouveautés juridiques de la période, qu’il s’agisse des lois et règlements, de la jurisprudence, des questions parlementaires, de nos publications, et du droit fiscal. Son nom est « La Feuille », terme que j’ai hérité de l’ancien président de l’académie d’agriculture Roger BLAIS, ancien conservateur des Eaux et Forêts, qui m’avait honoré de son amitié. J’ai tenu ce pari jusqu’à aujourd’hui, et même grâce à un index unique de plus de 2000 entrées, il est possible de savoir si une innovation a été apportée sur n’importe quelle question de droit forestier depuis 2010.
En 2015, devant ma masse documentaire, j’ai décidé d’écrire un code forestier commenté rendu nécessaire par le nouveau code forestier d’Etat. J’ai réussi à écrire le livre I et le livre II totalisant 1200 pages, et constituant le code de la forêt privée. J’écris pour 2016 le code de la forêt publique. Je pense ainsi qu’en 2016, la totalité du code forestier français sera commentée.
Demain
Par ailleurs, en tant qu’Universitaire, je me lance sur des travaux étrangers, en commençant par l’Afrique. Devant l’énormité des problèmes mondiaux que rencontre la forêt, il est important de lancer des travaux emblématiques que sont les thèses, pour constituer dans le bassin du Congo au moins, une doctrine de droit forestier solide et respectueuse de l’homme et de la nature. Plus tard, cette doctrine pourra donner naissance à de nouvelles lois forestières dans ces états. A cette fin, je rédige des thèses.
Se profilent aussi sur l’horizon, des travaux en Chine.
Tout cela sert aux forêts, et aussi aux hommes.
Et la clé de tout est la passion, sans laquelle rien ne peut s’accomplir.
Merci encore à Forestiers du Monde®, de m’avoir permis d’écrire ces quelques lignes.