En forêt, puis-je me promener partout ?
C’est une question régulièrement posée, souvent à l’approche de la période d’ouverture de la chasse. Aussi, sans la moindre prétention d’exhaustivité sur le sujet et sur la base des connaissances juridiques de son auteur, nous vous livrons dans cet article quelques informations en mesure de répondre à la question posée. Nous invitons naturellement tout citoyen à le corriger ou à l’enrichir.
Les conditions générales de l’accès du public en forêt
Avant la promulgation de la loi d’orientation forestière du 9 juillet 2001, publiée au Journal officiel le 11 juillet 2001, notre législateur se contentait d’affirmer (article 1 de la loi n°85-1273 du 4 décembre 1985 relative à la protection et à la mise en valeur de la forêt) que les opérations destinées à favoriser l’accueil du public en forêt participaient d’une mission de mise en valeur de la forêt française, qui est une mission d’intérêt général. En revanche, il n’existait aucun texte instituant pour le public un « droit d’accès » en forêt.
La création d’un nouveau titre VIII au sein du livre III du Code forestier traitant des dispositions applicables à tous bois et forêts intitulé « Accueil du public en forêt » est l’une des véritables nouveautés de la loi d’orientation forestière du 9 juillet 2001.
En effet, alors que d’une part le code de l’environnement se voyait doté d’un article L420.1 relatif, en matière cynégétique, aux usages non appropriatifs de la nature et que d’autre part la loi n°2000.627 du 6 juillet 2000 sur les sports se voyait enrichie des articles 50 et suivants relatifs aux servitudes d’itinéraires ou de sites propices aux sports de nature, le code forestier se contentait de faire allusion à l’accueil du public. Désormais, l’article unique L380-1 du Code forestier comble cette lacune et pose les fondements de l’accueil du public des forêts.
Cet article législatif, très général, inscrit clairement dans la loi la fonction sociale de la forêt en ciblant particulièrement la forêt domaniale que notre législateur a placé, et il le rappelle ici au passage, dans le domaine privé de l’Etat.
Pour les forêts privées, le propriétaire qui ouvre sa forêt au public sur le fondement d’une convention passée avec une collectivité territoriale en application de l’article L 130-5 du Code de l’urbanisme, peut percevoir une rémunération pour le service ainsi rendu.
Pour autant, puis-je me promener partout en forêt sans contrainte ?
Si désormais, l’Etat nous accueille dans ses forêts et invite les collectivités propriétaire de forêts et les propriétaires forestiers privés à l’imiter, les textes répressifs viennent, à contrario, encadrer les conditions d’accès du public en forêt en sanctionnant les auteurs des dommages volontaires à la propriété d’autrui (Articles L 322-1 et R 635-1 du Code Pénal) et les conducteurs de véhicules circulant hors des voies ouvertes (Articles R 331-3 du Code Forestier).
Dès lors qu’une forêt n’est pas clôturée ou interdite d’accès par des panneaux, le propriétaire est censé accepter la venue du public et assumer la responsabilité à l’égard de sinistres pouvant intervenir, soit par sa faute (imprudence, négligence, article 1382 du Code Civil),soit du fait des choses dont il a la garde (chutes d’arbres, de branches, articles 1384 du Code Civil).
De son côté le promeneur est pénalement et civiquement responsables des dommages qu’il peut causer à la forêt ou des troubles qu’il peut causer à la jouissance du gestionnaire et des infractions aux lois et règlements en vigueur (article 544 du Code Civil, article R 322-1 du Code Forestier pour l’utilisation du feu en forêt, …)
En réalité, la possibilité pour le public de se promener en forêt n’est que l’expression de la liberté de circuler, qui est un principe de droit non écrit. Cette liberté n’est pas absolue et a pour limite la double obligation de respecter la propriété d’autrui et de respecter les règles de droit en vigueur.
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Bonjour. Merci pour votre commentaire mais que voulez vous dire exactement ? Pouvez vous préciser ? Salutations forestières citoyennes. Jean-Noël CABASSY Forestiers du Monde® – France
Du fait que le public n’a aucun droit d’accès en forêt clairement reconnu, je pense que l’obligation de sécuriser la forêt (Chute des branches, prolifération des chenilles …) , devrait relever de la collectivité, sauf si celle-ci a établi une convention avec le propriétaire prévoyant notamment de le rétribuer pour lutter contre ce fléaux.
Dans le cas contraire les propriétaires risquent d’apposer des panneaux informant que l’accès de la forêt est interdit au public.
M. Daniel PERRIN, Bonjour. merci pour votre commentaire. On pourrait faire une distinction entre les forêts privées (la propriété est fixée par le code civil) et les forêts des personnes publiques (la propriété est fixée par le code général des propriétés des personnes publiques) en précisant que pour les forêts domaniales, le législateur commande à l’Office National des Forêts d’y organiser l’accueil du public. Mais pour répondre, je pense intéressant de citer l’Arrêt Abamonte ( Cour d’Appel de Besançon, 23 février 1979) qui stipule que « la forêt doit être considérée comme un milieu sauvage (…) dans lequel on ne peut s’aventurer qu’avec prudence et circonspection ». La forêt n’est pas un parc de loisirs et reste un milieu sauvage; pour préserver ce caractère naturel, le forestier ou le propriétaire n’affiche pas toutes les contraintes légales qui s’appliquent à celui qui les fréquente. Les règles sont, pour l’essentiel, énoncées dans le code forestier; on doit s’y comporter comme un invité et la quitter sans laisser de traces de son passage. Salutations forestières citoyennes. Jean-Noël CABASSY Forestiers du Monde®.
J’ai beaucoup hectares et je dois, si je vous lis, mettre des panneaux pour interdire l’accès à la propriété ?
C’est aux promeneurs de se renseigner si les bois sont privés ou publics ! De plus ils volent champignons, châtaignes, bois morts… et on ne doit rien dire ? N’importe quoi.
M. TISSOT DUPONT, Bonjour. Merci pour la lecture de l’article et votre réaction. Nous indiquons bien que toutes les forêts ont en France un propriétaire et qu’à ce titre, le droit de propriété étant constitutionnel, chacun devrait respecter la propriété d’autrui. Respecter, cela signifie essentiellement ne pas y porter atteinte, ne pas la dégrader. Et il devrait être évident de bien s’y comporter lorsqu’on fréquente une forêt qui n’est pas la sienne, à savoir rester sur les chemins et demander au propriétaire l’autorisation de ramasser ou collecter. La loi vous donne le droit de clôturer votre bien pour manifester clairement votre souhait de vous réserver le seul usage de votre forêt et de toutes ses aménités. Nul part nous n’incitons le promeneur à prélever quoi que ce soit sans autorisation !
Sachez aussi, que si en France la loi attribue la propriété des fruits naturels des forêts (on pense aux champignons notamment) au propriétaire, ce n’est pas le cas en Suisse ou ceux ci appartiennent à celui qui les découvre. Ainsi donc, en droit comparé, on découvre comment d’autres législateurs, tout autant soucieux de préserver la forêt et les droits des propriétaires, traitent de notre rapport à la nature. Salutations forestières citoyennes. Jean-Noël CABASSY Forestiers du Monde®.
bonjour, depuis 2015 les règles ont-elles changé sur l’accès en forêt privées? Le code forestier ayant été rafraichit.
Merci pour votre réponse.
M. Laurent LOGAN, Bonjour. Merci pour votre courriel qui nous rappelle combien la mise à jour des données juridiques publiées est un travail permanent ! Pour notre part, c’est la refonte du code forestier par ordonnance en 2012 qui impose une mise à jour de notre article. En effet, la nouvelle version de la partie législative du code forestier, suite à la réécriture dont il a fait l’objet par l’ordonnance du 26 janvier 2012, publiée au Journal Officiel du 27 janvier 2012 a notamment remplacé l’article L 380-1 du code forestier qui traite de l’accueil du public par trois nouveaux articles législatifs qui sont les articles L 122-9, L 122-10 et L 122-11. En effet, l’ancien article L 380-1 comportait 4 alinéas. Les 3 nouveaux articles législatifs reprennent chaque alinéa. Ainsi, l’article L 122-10 reprend l’alinéa 1 de l’ancien article L 380-1; L’article L 122-9 reprend l’alinéa 2 de l’ancien article L 380-1. Et l’article L 122-11 reprend les alinéas 3 et 4 de l’ancien article L 380-1. Fondamentalement, la réécriture s’est opérée à droit constant selon les conditions fixées par la loi d’habilitation (article 69 de la loi n°2010-874 du 27 juillet 2010). Il convient donc plus exactement d’une nouvelle version du code forestier plutôt que d’un nouveau code forestier. Selon notre analyse, aucune évolution fondamentale en matière d’accueil du public en forêt n’est donc sortie de cette nouvelle version. N’hésitez pas à nous faire part de votre éventuelle analyse sur ce sujet afin d’enrichir cet échange. Salutations forestières citoyennes. Jean-Noël CABASSY Forestiers du Monde®.
Bonjour,
Hier dimanche, je promenais mes deux chiens (attachés) en forêt domaniale. Après avoir parcouru deux kilomètres du GR , nous décidons d’emprunter un des nombreux chemins perpendiculaires. Au bout de quelques minutes nous sommes rattrapés ( c’est bien le mot on a vraiment eu l’impénétrable pris en chasse) par un range . Celui ci s’arrête à notre hauteur et la fenêtre conducteur s’abaisse sur un homme, une femme et des chiens a l’arrière.
Ce monsieur commence en nous indiquant que nous devons savoir pourquoi il nous a rejoint.
Réponse négative de notre part bien sûr….
Et là il nous apprend que la promenade n’est autorisée que sur les grandes allées. Sinon amende de plus de 100 €.
Il m’affirme (à ma demande) être garde forestier.
La forêt domaniale est celle de Montécôt en eure et loir.
Pas de chasse ce jour là et nous étions les seuls promeneurs.
A t’il raison et sur quel article de loi s’appuie t’il ?
Merci de vos réponses
Je viens de voir le documentaire « Le murmure de la foret » et apprend qu’en Allemagne la loi autorise d’aller dans les forets privees. De plus les grandes villes ont des forets urbaines tres etendues. Je crois que l’on devrait en prendre l’exemple car la foret est d’une grande necessite pour le bien-etre de l’humain tout comme la mer. La presence de promeneurs pourrait permettre une surveillance de son entretien et de sa sauvegarde. Un nouveau voisin qui a acheter une tres grande propriete toute boisee d’immenses epiceas est en train de tous les abattre depuis 6 ans. C’est un vrai creve-coeur.